Charles Prémont,
Le Lien MULTIMÉDIA
vol. 14 no 37 - 8 septembre 2008
Si les majors américains ont fait le passage vers la déclinaison sur plusieurs plateformes de leurs productions, il y a encore un bon bout de chemin à faire au Québec. Philippe Pelletier, Chef de service Nouveaux Médias chez Technicolor, met beaucoup d’énergie pour promouvoir l’idée que l’avenir n’est plus dans le DVD, mais bien dans le format numérique. « Il est temps de se demander comment le consommateur veut recevoir son produit. Autrement dit, il faut se mettre à gérer tout le cycle de vie d’un produit », dit-il. Une façon de penser les affaires qui, selon lui, pourrait être une réponse au P2P.
«Si on fait un modèle qui anticipe les capacités de chaque plateforme et qui mise sur ce que veut le consommateur tant en qualité de service et de prix, il n’y a pas de raison pour que les
gens continuent à aller sur des sites pour télécharger des torrents», dit Philippe Pelletier. Le problème réside selon lui dans le fait que l’offre qui se trouve présentement sur le Web n’arrive pas à la cheville de celle des sites de pirates. «Oui, aller télécharger des torrents, c’est long, mais tout est là. Si j’ai une boutique en ligne qui me permet d’acheter n’importe quel film pour trois dollars et m’offre du contenu exclusif en plus, pourquoi irais-je risquer d’attraper un virus sur un site de P2P», demande-t-il. Pour y arriver, il faut changer quelque peu la façon de penser son projet. «On peut vouloir faire un film, ce qui est très correct, mais on peut aussi vouloir faire un projet. Chaque plateforme a ses particularités et il faut savoir s’adapter à chacune d’elle si on veut en tirer le maximum. Aussi, l’ordre dans lequel on pense notre projet n’est pas nécessairement le même. On peut commencer par le film pour dériver vers le Web et le mobile, mais on peut aussi commencer par le mobile pour se rendre sur le Web et, éventuellement, à la télévision», explique Philippe Pelletier. Un bon exemple, selon lui, est Le Cas Roberge qui a profité de ses capsules Web pour promouvoir le film.
L’intérêt d’une déclinaison sur plusieurs plateformes réside dans la promotion de la marque. «Il faut faire ce que j’appelle du “brand streaming ”, c’est-à-dire qu’il faut reprendre la marque le plus souvent possible sur le plus de plateformes possible. Le but, c’est que l’idée circule pour diriger les gens vers les plateformes qui sont payantes. Quand on pense à une mise en marché de cette façon, il ne faut pas s’imaginer que toutes les plateformes seront rentables, mais bien que toutes les plateformes qu’on utilise contribueront à mousser les ventes de celles qui le sont», explique Philippe Pelletier.
Selon lui, le Québec est un microcosme idéal pour ce genre de modèle de mise en marché. «Les plateformes comme le Web ou le mobile se prêtent très bien aux productions à très petit budget. Il faut aussi penser que les plateformes sont accessibles à la grande majorité des gens. Faire que son film soit disponible sur le Web en format HD peut toucher plus de gens que d’en faire un disque Blu-Ray», dit-il. Les coûts pour décliner son produit sur plusieurs plateformes sont loin d’être prohibitifs à son avis.
Des obstacles technologiques et industriels importants restent cependant à franchir avant qu’un modèle d’affaires basé sur les multiples plateformes remplace celui qui est en place présentement. «L’important, c’est d’avoir une bonne boutique en ligne, une qui soit capable de soutenir un grand achalandage. Si on y offre des prix alléchants et des avantages, les gens vont se diriger vers le Web pour consommer leurs produits culturels. Le magasin iTunes est déjà un des plus grands magasins de produits culturels au monde. Ils s’attaquent directement au marché du DVD et je ne serais pas surpris qu’ils réussissent à le dépasser », dit Philippe Pelletier.
Selon Philippe Pelletier, la déclinaison sur plusieurs plateformes offre beaucoup de potentiel, tant dans les formats grands publics que dans les productions spécialisées. «Il faut arrêter de penser qu’il n’y a qu’une plateforme légitime pour son produit. Le Web et le mobile sont des modes de consommation faciles. Les gens de l’industrie se plaignent de la perte de revenu engendrée par l’Internet, mais ce n’est pas dire toute l’histoire. Quand des milliers d’admirateurs bloguent et mettent des extraits de notre produit sur YouTube, ce n’est certainement pas que négatif. Les humains veulent faire partie de quelque chose, ils veulent être au courant et vivre des trucs ensemble: on ne peut pas aller contre ça», explique-t-il.
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